Excuses et dédommagement pour Omar Khadr: le Canada face aux conséquences d’un défaut de respecter l’État de droit
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7 juillet 2017
Avocats sans frontières Canada (ASFC) salue la décision annoncée aujourd’hui par le gouvernement du Canada de présenter des excuses à Omar Khadr pour les violations graves des droits humains dont a été victime ce citoyen canadien et auxquelles le Canada a participé. Un dédommagement financier lui serait également versé.
«Omar Khadr était un mineur au moment des faits. Il a été soumis à Guantanamo à une parodie de justice devant des commissions militaires contrevenant aux standards les plus fondamentaux du droit international, du droit du Canada et celui des États-Unis. Il a subi des traitements cruels, inhumains et dégradants. Le Canada a non seulement laissé faire, mais a aussi participé à ce processus. Peu importe leur nom, leur religion, la couleur de leur peau ou leur famille, tous les Canadiens ont le droit d’être protégés contre l’arbitraire et les mauvais traitements, c’est la base de l’État de droit. En reconnaissant sa responsabilité, le Canada pose le bon geste.»
Me Pascal Paradis, directeur général d’ASFC
Le Canada a contrevenu à ses obligations
ASFC a mené en 2008 une coalition d’organisations juridiques canadiennes (dont l’Association du barreau canadien et le Barreau du Québec) en faveur du rapatriement au Canada d’Omar Khadr. À cette fin, ASFC a publié une Déclaration et demande relative au rapatriement d’Omar Khadr dans laquelle elle démontrait, sur la base des normes juridiques applicables, que le Canada avait violé plusieurs conventions internationales de même que le droit canadien en participant aux interrogatoires d’Omar Khadr à Guantanamo, sachant qu’il avait subi des mauvais traitements et qu’il faisait l’objet d’un processus inéquitable.
ASFC est par la suite intervenue en Cour suprême du Canada dans l’affaire Canada c. Khadr. ASFC est aussi une des rares organisations à avoir assisté aux audiences de la commission militaire à la base de Guantanamo. ASFC avait conclu qu’il s’agissait d’«un système en marge de l’État de droit», mettant en doute la validité de l’admission de responsabilité qu’il été contraint, selon toute vraisemblance, de signer.
Des dédommagements justifiés en droit, mais qui auraient pu être évités
Rappelons qu’en 2010, la Cour suprême du Canada a statué que le Canada a participé à un processus contraire à ses obligations internationales et a violé le droit à la liberté et à la sécurité de M. Khadr garanti par l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés.
La Cour suprême du Canada a par ailleurs reconnu à plusieurs reprises que l’octroi d’une compensation monétaire peut constituer une réparation appropriée en cas de violation d’un droit protégé par la Charte canadienne des droits et libertés. Le droit à la réparation de victimes de violations de droits humains est aussi reconnu par plusieurs instruments internationaux, dont la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
« L’annonce d’aujourd’hui démontre l’importance de faire primer le droit sur les opinions et les préjugés. Dans sa Déclaration et demande relative au rapatriement d’Omar Khadr publiée en 2008, ASFC concluait que nous étions tous concernés par le dossier d’Omar Khadr parce qu’en bout de ligne, nous pourrions avoir à payer le prix pour les violations de ses droits. La leçon que l’on doit retenir de ce triste épisode est que l’État de droit n’est pas un menu à la carte : il représente les valeurs fondamentales que nous avons choisi de nous donner et que nous avons le devoir, en tant que société libre et démocratique, de respecter. »
Me Pascal Paradis, directeur général d’ASFC