Bamako, le 1er novembre 2024 – Les représentant.e.s de 575 acteurs et actrices de changement (AAC) réuni.e.s le 31 octobre 2024 à l’hôtel Millennium de Bamako ont adressé aux décideur.euse.s, dont le Ministère de la Justice et des droits de l’Homme, plusieurs recommandations, au terme de panels, pour lutter de manière efficiente contre l’impunité du viol, demandant notamment l’application stricte de l’article 226 du Code pénal malien.
Selon le rapport annuel du Système de gestion des informations sur la violence basée sur le genre (GBVIMS), 15.993 personnes ont subi des violences basées sur le genre au Mali en 2023, dont les viols constituent 25% des cas. Selon l’Enquête Démographique et de Santé de 2018, 87% des violences sexuelles commises envers les femmes sont perpétrées par leur mari ou partenaire actuel. Ces données préoccupantes mettent en lumière l’urgence d’une réponse collective et concertée pour lutter contre ces violations graves des droits humains.
Formé.e.s et soutenu.e.s dans le cadre du projet « Appui à la justice et à la paix au Mali » (JUPAX), mis en oeuvre par Avocats sans frontières Canada, avec le soutien financier d’Affaires mondiales Canada, les acteurs et actrices de changement sont devenu.e.s les dernières années des références dans leur communauté et poursuivent un travail de sensibilisation pour mettre un frein à la honte et à la stigmatisation qui constituent un obstacle au droit à la justice pour les survivantes de violences sexuelle, en particulier dans les cas de viols.
Bien que l’article 226 du Code pénal malien punit le viol d’une peine de réclusion de cinq à vingt ans, pouvant aller jusqu’à la perpétuité dans les cas les plus graves, « dans beaucoup de cas de viol, le social, à savoir le règlement à l’amiable prime le plus souvent sur la justice » regrette Kadiatou Diassana, AAC de Ségou.
Au-delà du règlement à l’amiable, plusieurs autres obstacles compromettent l’atteinte de l’application des sanctions prévues à l’article 226 du Code pénal. Parmi ceux-ci, un fardeau de preuve élevé incluant des examens médicaux intrusifs, l’absence de protection adéquate des victimes tout au long du processus judiciaire, la faible formation et le manque de compétences du personnel judiciaire et juridique pour la gestion des cas de viol entraînant la révictimisation, la peur des représailles des auteurs et du jugement social. Ces défis dissuadent les survivantes du viol qui veulent porter plainte au Mali et favorisent l’impunité des auteurs.
Face à cette réalité, il est crucial de trouver et d’appliquer des solutions durables pour garantir une protection efficace aux survivantes et renforcer l’application des lois en vigueur. Les AAC recommandent de :
Au Ministre de la Justice et des droits de l’homme :
– Prendre des mesures efficientes pour l’application stricte de l’article 226 du Code pénal pour une meilleure protection des femmes et filles victimes de viol;
– Assurer la sécurité des femmes et des filles;
– Renforcer les capacités des acteurs et actrices de la chaîne pénale sur la gestion des cas de viol afin de réduire la nouvelle victimisation des survivantes.
Au Ministre de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille :
– Assurer l’opérationnalisation des structures de prise en charge holistique des femmes et filles survivantes de viol.
Aux magistrat.e.s :
– Traiter avec diligence les cas de viol sur les femmes et filles en appliquant rigoureusement l’article 226 du Code pénal ;
Aux officiers de police judiciaire :
– Traiter avec humanité et dignité les survivantes de viols, dans le respect de la confidentialité leurs dossiers.
À propos
Avocats sans frontières Canada est une organisation de coopération internationale qui, depuis plus de 20 ans, contribue à la mise en œuvre des droits humains des personnes en situation de vulnérabilité par le renforcement de l’accès à la justice et à la représentation juridique.
Renseignements
Racki Gakou, responsable communications et plaidoyer
racki.gakou@asfcanada.ca