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30 avril 2024

Les Haïtiennes qui étudient le droit et en font une carrière sont exposées à des traitements discriminants liés spécifiquement à leur sexe durant leur cursus scolaire et tout au long de leur carrière, démontre une étude publiée en avril 2024 par le Barreau de Port-au-Prince, en collaboration avec Avocats sans frontières Canada (ASFC), portant sur « l’accès des femmes à la profession d’avocate en Haïti ». Un portrait alarmant qui pourrait expliquer la féminisation lente, même si souhaitable, de la profession.

 

L’étude, rendue possible grâce à l’appui financier du gouvernement du Canada, s’appuie sur un échantillon de 235 avocates au niveau des 18 barreaux du pays, près de la moitié du nombre total d’avocates actives. Les données collectées rendent compte de résistances importantes, notamment sociales et systémiques, qui visent à décourager ou à sous-estimer le rôle essentiel des femmes au sein des métiers du droit et de la justice, débutant sur les bancs des universités.

 

L’étude révèle notamment que le manque d’encadrement dans la rédaction du mémoire et dans la recherche de stage expose de manière disproportionnée les étudiantes à des inconduites et avances sexuelles.

 

Une avocate sondée avance que : « Alors que j’ai validé tous mes cours depuis 2006, je n’ai réussi à soutenir mon mémoire qu’en 2012, tellement j’étais découragée par les avances sexuelles de la part des encadreurs auxquels je m’étais adressée. Quand j’ai compris le piège, je me suis arrangée pour rassembler 40 000 milles gourdes et payer un encadreur. [traduction libre]»

 

La situation ne serait guère différente une fois employée. Près d’une avocate sur trois (29,4%) a déclaré avoir été victime dans son emploi de discrimination et de propos ou traitements portant atteinte à sa dignité en tant que femmes. Des pressions sexistes pour certaines qui les ont contraintes à limiter le temps consacré à l’exercice de leur profession et qui pourraient en rebuter d’autres à se lancer.

 

Une féminisation lente de la profession d’avocat.e en Haïti, malgré un intérêt prononcé

 

Pour la période allant de 1970 à 2020, les données collectées par le Barreau de Port-au-Prince indiquent un rythme lent de croissance du nombre d’avocates: 350 avocates en 50 ans, près de 10 fois moins que pour les hommes. Dans une majorité de barreaux, la représentation féminine demeure en dessous des 5%.

 

Pourtant, les résultats de l’étude confirment un intérêt marqué chez les femmes à faire des études de droit en Haïti. Les demandes d’admission des femmes aux facultés de droit haïtiennes représentent, en moyenne, 6 fois le nombre total d’étudiant.e.s admis.e.s chaque année, qui expliquent mal l’absence d’avocates.

 

De ces constats se dégage des zones nettes d’améliorations au niveau des universités, des barreaux, incluant la Fédération des Barreaux d’Haïti, et des autorités compétentes, particulièrement, le Ministère à la condition féminine et aux droits des femmes, que le Barreau de Port-au-Prince et ASFC ne tardent pas à mettre en relief.

 

Cette vidéo introductive résume les causes qui ont motivés cette étude, les principaux résultats qu’elle a permis de mettre en lumière, ainsi que les pistes d’actions envisageables pour lutter contre les obstacles et créer de meilleures conditions au plein épanouissement professionnel des Haïtiennes.